Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
8 août 2009 6 08 /08 /août /2009 21:25

       Les Alliés avaient prévu la libération de Caen dès le 6 juin 1944. Mais les 15 à 20 000 civils caennais restés dans la ville devront attendre et souffrir 33 jours de plus pour voir les premiers Canadiens et Britanniques arriver dans la cité normande. Au cours de ce long mois, la ville fut sévèrement bombardée, notamment dans la nuit du 6 au 7 juin et le soir du 7 juillet 1944, où 2 600 tonnes de bombes furent larguées (environ 2 000 Caennais sont morts au cours des bombardements de juin et juillet 1944).

 


Carte de Caen provenant de l'ouvrage "la Bataille du Calvados" (Albert Grandais)

        Le 8 juillet, l’opération Charnwood débute. La 3e division d’infanterie canadienne, les 59e DI et 3e DI britanniques s’emparent difficilement des villages au nord / nord-ouest de Caen : Hérouville, Lébisey, Epron, Buron, Saint-Contest, Gruchy, Authie, Cussy, Franqueville, puis l’abbaye d’Ardenne dans la soirée. Dans la nuit du 8 au 9, les S.S. de la division Hitlerjugend reçoivent l’ordre de se replier sur la rive droite de l’Orne. Dans la matinée du 8, la rue de Bayeux est bombardée pour couper toute retraite aux Allemands. Ce bombardement fera 50 victimes.

 

       Le 9 juillet, la 59e DI (Staffordshire) chasse les derniers Allemands retranchés au nord de Caen, dans le secteur de Galmanche, La Folie et Couvrechef (cependant, cette division ne rentrera pas dans la ville).

 

       Dans le secteur canadien, les Glens, de la 9e Brigade d’infanterie, sont désignés pour entrer les premiers dans la ville. Le squadron C du Sherbrooke Fusiliers Regiment (27e régiment blindé de la 2e Brigade blindée canadienne) accompagnera leur progression.

 

      A 9h30, les 2e et 3e batteries du SS.Flak.Abteilung.12, ainsi que la Divisionsbegleitkompanie (compagnie d’escorte divisionnaire), quittent Saint-Germain-la-Blanche-Herbe pour Vaucelles.

La compagnie D des Glens atteint Franqueville sans rencontrer de difficultés. Un peu avant 10 heures, elle s’engage sur l’axe Caen-Bayeux au niveau de Carpiquet. La colonne comprend également la compagnie C des Glens, deux sections du Royal Canadian Engineers (génie), deux sections du Camerons Highlanders of Ottawa (1 de mitrailleuses et 1 de mortiers), et deux Sherman d’observation du 14e régiment d’artillerie.

 

       L’accès à Saint-Germain est infesté de mines, empêchant toute progression. Les sapeurs canadiens venus nettoyer le secteur sont pris sous le feu ennemi et trois Sherman du Sherbrooke sautent sur les mines. D’autres chars ouvrent le feu vers les maisons où sont retranchés les S.S. Ces derniers fuient vers la Maladrerie. Les chars fléaux (Sherman Fails) du 22nd Dragoons (appartenant à la 79e DB britannique) sont appelés pour déminer la zone, cette opération permettant par la suite de dégager deux couloirs délimités par des rubans blancs.

 

       A 11h15, les Canadiens, positionnés en amont du croisement des routes de Bayeux et de Carpiquet, subissent quelques tirs d’artillerie. Ils arrivent cependant à la place du Planître et sont accueillis par des rafales de mitrailleuses provenant de l’abri bétonné situé sur la place. Le premier Sherman arrivant sur la zone est immobilisé par une mine, mais le tireur du blindé parvient au premier coup de canon à neutraliser la position.


 

Bernard Hoo, John MacCouville et J R Kostick du Queen's Own Rifles of Canada, ouest de Caen, 9 juillet 1944

       Dix minutes plus tard, les Canadiens signalent leur arrivée dans Caen. Les bataillons Highland Light Infantry of Canada et North Nova Scotia Highlandeurs suivent la première colonne canadienne. La 16e section (compagnie D) des Glens arrive devant la prison Beaulieu, rue du général Moulin. Il n’y a pas eu d’opposition. Cependant, vers midi, la progression dans cette rue devient difficile. Les S.S. utilisent mortiers et mitrailleuses. Entre les rues Deslongchamps et Bernard Palissy, les Canadiens subissent un feu nourri. Les chars ripostent, et deux autres forcent la grille des Pépinières à la poursuite des S.S.


 

       Vers 12h30, la compagnie D atteint la voie ferrée sur le boulevard Dunois. Au même moment, les blindés britanniques du Inns of Court se dirigent vers la rue d’Authie. Puis les Canadiens descendent la rue de Bayeux sur deux files1). Les chars dépassent le carrefour avec la rue Damozanne. Les S.S. ont déjà quitté le secteur, vus pour la dernière fois place des Petites-Boucheries, vers 11 heures (3 Panzer et quelques grenadiers de la Hitlerjugend).

 

       A 13 heures, les companies C et D des Glens parviennent jusqu’à la place des Petites-Boucheries et poursuivent leur avancée rue Guillaume le Conquérant et place Fontette. Quant aux compagnies A et B, elles tournent à droite depuis la place, s’engagent dans la rue Caponière, puis la rue du Carel et la promenade du Fort, et rejoignent la place Gambetta. Dans ce secteur, un peloton de blindés se stationne boulevard Bertrand.


 

Soldats canadiens, quartier de la Maladrerie, 9 juillet



Sherman place des Petites-Boucheries, Caen

       Le lieutenant-colonel Hope entre dans l’abbatiale Saint-Etienne et annonce la libération. Il interdit cependant à la population de sortir avant 17 heures.

 

       M.Poirier, adjoint au maire de Caen, M.Detolle, décrit l’arrivée des Canadiens : « Les drapeaux tricolores sortent, et nos amis canadiens qui parlent tous un français impeccable nous bourrent de cigarettes, de chocolats et de bonbons. Les femmes les embrassent. Les hommes les saluent, mais le tout avec dignité, sans folle exagération. Nous avons trop souffert dans nos affections les plus chères pour acclamer ceux que les nécessités de la guerre ont obligés à nous faire tant de mal ».

       Puis Hope et plusieurs FFI se dirigent vers la place Saint-Pierre, où Britanniques, descendant la rue de Geôle, et Canadiens se rejoignent. Puis un Canadien s’effondre, abattu par un tireur dissimulé dans les ruines. La chasse aux snipers dans les ruines de Caen commence2).

 

       Le bataillon HLI s’établit à la Maladrerie et le QG de la 9e Brigade est installé au séminaire Saint-Paul. Venant de la rue Galliéni, les Novas, rejoints par les chars du Fort Garry Horse, descendent la rue Henri Chéron. Ils sont guidés par Jules Hollier-Larousse, maire de Louvigny.

 

 

       Vers 17 heures, le 7e régiment de reconnaissance (17th Duke of York’s Royal Canadian Hussars) s’avance vers l’Orne, mais les ponts étant détruits, les blindés ne peuvent franchir la rivière. Au cours de ce même après-midi, les derniers Allemands ont réussi à franchir l’Orne.

 

 

La 3e DI canadienne perd au cours du 8 et du 9 juillet 1 194 hommes, dont 330 tués.

La 9e brigade compte 69 tués et blessés le 9 juillet.

 

Artilleurs du 1st KOSB de la 3e DI britannique pointant un canon antichar, rue du Vaugueux, vers l'abbaye aux Dames

       Du côté britannique, vers 5 heures, un groupe du 2nd Royal Ulster Rifles du Lieutenant-colonel Harris arrive de la route d’Ouistreham, vers le cimetière nord-ouest. Un autre groupe du 2nd RUR se dirige vers Saint-Julien, au sud ouest de la Cote 64. A 7 heures, les troupes sont dans le secteur du cimetière Saint-Gabriel et sont ralenties par la présence d’Allemands disposant de deux mitrailleuses. Une demi-heure plus tard, les Britanniques s’infiltrent rue Marescot et se dirigent vers la rue des Rosiers. D’autres tirs ennemis proviennent du Jardin des Plantes.

 

       La compagnie B du Major Hyde du 2nd RUR descend vers la ville et prend le Calvaire Saint-Pierre. Quelques minutes plus tard, un échange de tirs a lieu au Moulin-du-Roy entre les Tommies et des Jäger de la 16.Luftwaffe Feld-Division. Ces derniers se replient et disparaissent vers le château.

A 11h30, cette même compagnie rejoint le boulevard des Alliés pendant que la compagnie C du 1st King's Own Scottish Borderers du Lieutenant-colonel Renny est stoppée aux abords de la rue de Lébisey.

 

       En début d’après-midi, vers 13 heures, les compagnies C et D du 1st KOSB sont au château et éliminent des nids de mitrailleuses de la 16.LFD. Quelques sections dépassent la place Courtonne et franchissent la rive nord du canal.

Peu après, les compagnies A et B du même régiment rejoignent les compagnies C et D au château. Pendant ce temps, les blindés du 3e régiment de reconnaissance (The Northumberland Fusiliers) s’emparent du quartier Saint-Jean-Eudes et du château de la Rochelle.

 

 

L'abbaye aux Hommes et le lycée Malherbe. Levée du drapeau français le 9 juillet au soir

       A 18 heures, place Monseigneur-des-Hameaux, où soldats alliés et FFI présentent leurs armes, le capitaine Léonard Gilles, de la compagnie Fred Scamaroni, lève le drapeau tricolore marqué de la croix de Lorraine, accompagné de la Marseillaise.

 

 

 

       La prise de Caen est perçue comme un succès tactique. Le bulletin de la BBC à 19h30 annonce que « Caen est libérée et est entièrement aux mains des Alliés. Les Britanniques venant du nord et les Canadiens de l’ouest, ont opéré leur jonction au centre de la ville ».

        En réalité, seule la rive gauche fut libérée le 9. Il faudra attendre le 19 juillet pour que la ville soit totalement délivrée par les Canadiens, aidés de FFI.

 

1) Au cours de la progression dans la rue de Bayeux, un officier ordonne à l’équipage du char de tête de tirer sur les deux tours de l’abbatiale Saint-Etienne. Or, environ 2 000 personnes y ont trouvé refuge. Fort heureusement, au moment où le tankiste ajuste le tir, il reçoit un contrordre.

 

2) Le Major Pearson, officier des Glens, se dirige jusqu’à la caserne Hamelin, au bord de l’Orne. Il y observe le tir des mortiers et des mitrailleuses sur la rive opposée. Soudain, il surprend un sniper S.S. dans les ruines et l’abat.

 

 

Sources :

 

Mourir à Caen (Albert Pipet)

Charnwood (Dominique Barbé)

La Bataille du Calvados (Albert Grandais)

La Bataille de Caen (Jean-Pierre Benamou)

Juno Beach – Les Canadiens dans la bataille (Guy Chrétien)





Entrée du QG de la 9e brigade canadienne, rue général Moulin, Caen, 10 juillet



Sherman d'observation du 14e Régiment d'artillerie canadien entrant dans Caen par le quartier de la Maladrerie




Monument de la 3e DI britannique, avenue de la Libération



Monument canadien, place des Petites-Boucheries



Plaque place Monseigneur-des-Hameaux

 

 

Quelques lieux de Caen en images: en 1944 et en 2010.

 

Caen- Immeubles en ruines à proximité du bassin Saint-Pie P2070195aa

Avenue de Tourville: pont du canal

 

Caen- Le château; La chapelle Saint-Georges endommagée, 1  P2070108aa

Château: chapelle Saint-Georges

 

Caen- Levée du drapeau français Place Msr des Hameaux, 09  P2070167aa

Abbaye aux Hommes: entrée de l'abbatiale

 

Caen- Place Fontette et rue Guillaume le Conquérant, 10.07  P2070157aa

Place Fontette

 

Caen- Place St-Pierre, poste de guet du 1st KOSB, 09.07.194  P2070113aa

Rue Saint-Pierre

 

Caen- Rue des Chanoines, canon antichar et Sherman; Au fond  P2070098aa.JPG

Rue des Chanoines

 

Caen- Un Sherman débouche, place des Petites-Boucheries, 0  P2070170aa

Place des Petites Boucheries

 

Caen- Vue de la ville depuis le château  P2070104aa

Château: vue sur l'église Saint-Pierre

Partager cet article
Repost0

commentaires